En octobre 2019, un soulèvement d’une ampleur sans précédent éclate au Liban, unissant une large partie de la société au-delà des clivages confessionnels, régionaux ou de classe. Pour la première fois depuis la fin de la guerre civile, l’oligarchie au pouvoir depuis des décennies est désignée dans son ensemble comme responsable de la crise dans laquelle commence à s’enfoncer le pays. Les jeunes générations sont au cœur de ce soulèvement, revendiquant le droit de ne pas être exilés, ainsi que l’accès à une éducation publique, gratuite et de qualité et à une offre de travail locale. Quelques années plus tard, la société libanaise sombre dans la plus grande crise de son histoire contemporaine. Celle-ci touche les différents secteurs du pays, et en particulier l’enseignement supérieur, maillon clé d’un modèle économique d’inspiration néolibérale basé notamment sur l’exportation massive d’une main-d’œuvre hautement qualifiée. Ce livre examine la manière dont le modèle dominant néolibéral de l’enseignement supérieur est adapté et contesté dans le contexte libanais depuis le début des années 1990. Il vise en particulier à analyser d’un côté les reconfigurations de l’enseignement supérieur induites par la crise socioéconomique et politique qui s’est intensifiée à partir de 2020 et, de l’autre, les résistances à ce modèle, en particulier au sein du mouvement étudiant et parmi les enseignants-chercheurs à l’Université libanaise et durant l’intifada d’octobre 2019. Au-delà des questionnements scientifiques soulevés par nos recherches, ce livre vient répondre aussi à la nécessité de rendre justice aux acteurs sociaux qui ont cru, du moins quelque temps, dans la possibilité de changer le système et de construire une société plus juste et plus égalitaire au Liban.